Voyage au bout de la nuit

Posted by Aldine on 27 août 2015 in |

À PROPOS.

Le dimanche 4 octobre 1914, alors que Français et Allemands se font face dans le Nord, débarque du train, à Armentières, la 6e brigade de cuirassiers français. Parmi les hommes du 2e escadron du 12e régiment, le maréchal des logis Louis Destouches, dont personne sans doute, y compris lui-même, n’imagine qu’il deviendra vingt ans plus tard, sous le nom de Céline, un des romanciers français les plus célèbres. La mission du 12e « cuir » est de tenir les ponts sur la Lys à Houplines et Frelinghien.

Ce qu’il ne fera pas. Dès le lendemain et les jours suivants, les troupes allemandes, enfonçant les positions françaises, occupent la vallée de la Lys. Petit épisode de la « Grande Guerre » qui faillit pourtant bien être fatale au maréchal des logis Destouches: au retour d’une mission de reconnaissance sur la rive gauche de la Lys, dans les bois de Ploegsteert, un trompette est tué à côté de lui et son lieutenant s’affale sur sa monture, atteint à la cuisse. Destouches sauve l’officier en le ramenant dans les lignes françaises, ficelé sur son cheval.

DE L’HISTORIEN À L’ÉCRIVAIN

Voilà pour les événements vus par l’historien. Que deviennent-ils sous la plume de l’écrivain Céline? Un étrange et sinistre… voyage au bout de la nuit. Chargé d’une mission de reconnaissance vers Noirceur-sur-la-Lys, « ville de tisserands » (Comines-France selon Francis De Simpel), le brigadier Bardamu part seul, la nuit. Traversant un village, il aperçoit une lueur au-dessus d’une porte. Il cogne, insiste, cogne encore, jusqu’à ce qu’une femme lui ouvre. On l’informe que les dragons allemands sont passés tantôt: « Ils ont brûlé une maison près de la mairie puis ici ils ont tué mon petit frère avec un coup de lance dans le ventre… Comme il jouait sur le Pont Rouge, en les regardant passer…Tenez ! qu’elle me montra… Il est là…. » Quel rapport avec la réalité ? Le Pont Rouge existe vraiment, à Warneton. Quant à l’enfant, un témoin rapporte qu’un adolescent a été transpercé d’un coup de lance par un Uhlan, le 5 octobre 114, près de Deulémont…

Poursuivant vers Noirceur, Bardamu rencontre un déserteur: « J’en ai assez, moi, qu’il répétait, je vais aller me faire paumer par les Boches ». Puis à Noirceur, c’est la rencontre avec le maire, « un homme épais et barbu » (Désiré Ducarin, maire de Comines-France à l’époque ?).

Le récit de Céline mélange donc des éléments réels à d’autres fictifs ou transposés. Une conclusion s’impose cependant, estime Francis De Simple: Louis-Ferdinand Céline avait conservé un souvenir assez précis du passage du maréchal des logis Destouches, dans la vallée de la Lys, en octobre 1914.

Source : « Le Soir » du 11 janvier 1994.

Le roman est en ligne, mais pas libre de droits pour tous les pays.

Dans les semaines qui suivent, Céline est hospitalisé à Hazebrouck :

Dans une ambulance de campagne, près d’Ypres, le médecin-major voulut amputer le bras blessé du maréchal des logis Destouches. (…) Ce n’était pas l’avis de Louis Destouches, le cuirassier mauvais coucheur, l’empêcheur d’opérer en rond. Il refusa l’opération. Il refusa l’intervention. On lui fit donc un pansement de fortune avant de l’évacuer sur l’hôpital auxiliaire n° 6 installé dans le collège Saint-Jacques, à Hazebrouck. Deux jours plus tard seulement, le 29 octobre, un médecin de la ville l’opéra et réussit à extraire la balle.

Extrait de La Vie de Céline, par Fr. Vitoux (2005).

 


Genre: Roman
Série: années 1930 | Thèmes: COMINES, HAZEBROUCK

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