La 628-E8

Posted by Aldine on 22 août 2015 in |

CHEZ LES BELGES.

Ce n’est pas en passant quelques jours dans un pays qu’on peut juger de ses mœurs, de ses tendances, de ses idées, de ses institutions. Les observations y sont forcément rapides et superficielles ; elles ne portent que sur un ordre de choses infiniment restreint, et d’ailleurs peu important. On n’atteint pas l’âme intime, l’âme secrète, l’âme profonde d’un pays, à moins d’y vivre de sa vie… Il faut donc se contenter des apparences, qui trompent souvent. En considération de quoi, je prie les lecteurs de me pardonner le ton parfois frivole et injuste de ces pages.

Pourtant, dès que vous entrez en Belgique, vous êtes frappé par cette sorte de malaria religieuse qui y règne. Elle attriste singulièrement ce petit pays… C’est peut-être cela qui rend si noires ces verdures de la campagne belge que détestait tant Baudelaire… De même que dans notre sauvage et dolente Bretagne, où l’esprit religieux a en quelque sorte tout pétrifié, de même que, dans le Tyrol autrichien, où, à chaque tournant de route, à chaque carrefour, partout, se dressent des images de sainteté qui pourraient servir à l’administration vicinale de bornes kilométriques, de même, en Belgique, la superstition religieuse est souveraine maîtresse des âmes, des paysages et des lois. Je ne parle pas seulement des couvents qui y pullulent, comme, en Allemagne, les casernes ; je ne parle pas de ces béguinages, qui ne sont d’ailleurs plus que des souvenirs, gardés seulement par Gand et par Bruges, pour les badauds du pittoresque et les moutons de Panurge du tourisme. Je parle de tout ce pays, sur qui le catholicisme étend son ombre épaisse et malsaine. Dans les chemins, dans les sentes et dans les villes, on rencontre, par milliers, de ces figures de foi têtue, de ces figures de prières, agressives et sombres, telles qu’elles sont peintes dans les triptyques des primitifs flamands. Les siècles ont passé sur elles, les progrès et la science ont passé sur elles, sans en adoucir les angles durs et obtus.

Lire en ligne


Genre: Récit, Satire
Série: années 1900 | Thèmes: auto, BRUXELLES, usages, voyage

Copyright © 2015-2024 Aldine All rights reserved.
This site is using the Desk Mess Mirrored theme, v2.4, from BuyNowShop.com.